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Belle, belle, belle Normandie
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19 septembre 2015

Abbaye Notre-Dame de Grestain

Fatouville-Grestain l'abbaye cv

Elle est à l’écart des lieux fréquentés,bien cachée près d’une petite route longeant l’estuaire de la Seine, à l’endroit où le paysage de marais s’ouvre aux lumière changeantes et aux tons subtils des alignements de peupliers.

La promenade est belle, à l’abri de l’ancien mur de l’abbaye, appareillé de pierre et silex. Et, passée la porte, l’atmosphère paisible du parc n’est troublée que par le bruit de l’eau qui court ; comme dans un rêve, se distinguent alors des arcades gothiques, la pierre grisée parle temps d’une maison de maître.
Un rêve est d’ailleurs le point de départ : celui d’Herluin de Conteville qui a fondé l’abbaye de Grestain en 1050 : lépreux, il vit apparaître la Vierge Marie qui lui promit la guérison s’il relevait une ancienne chapelle qui lui était dédiée près d’une source. Il le fit et guérit..et épousa plus tard Arlette, mère de Guillaume le Conquérant.  Herluin, Arlette, ainsi que d’autres membres de leur famille sont enterrés à Grestain, quelque part dans l’enceinte de l’Abbaye comme l’atteste le « Rouleau mortuaire de Saint-Vital », daté de 1123, conservé à la Bibliothèque Nationale.

 

Arlette et sa famille arbre

L’ancienne abbaye Notre-Dame de Grestain
fut fondée par Herluin de Conteville vers 1050. Son épouse Arlette, veuve du Duc Robert le Magnifique, la mère de Guillaume le Conquérant, fut inhumé avec Herluin dans le chœur de l’église abbatiale, aujourd’hui détruite. De même que leur fils Robert, demi-frère de Guillaume, son plus fidèle compagnon qui joua à ses côtés un rôle de premier plan dans la conquète de l’angleterre en 1066.
Ce site à proximité de Conteville a été choisi par Herluin, alors atteint d’une grave maladie de peau, à la suite d’un songe : la vierge lui apparut et lui prescrivit de se purifier dans l’eau d’une fontaine située précisément à Grestain. Guéri, Herluin fonda l’abbaye dédiée à Notre-Dame en témoignage de reconnaissance.
Richement dotée de biens situés tant en Normandie qu’en Angleterre, elle joua dans l’histoire un rôle important, comparable à celui des grandes abbayes normandes de l’époque…
Le songe d’Herluin
Herluin de Conteville souffrait d’une maladie de la peau qu’aucun remède ne parvenait à guérir.

Le songe d’Herluin

« Accidit ut quamdam nocte, dum dormiret, sibi visa sit apparere virgo Maria, manu gestans florem candidum, in modum virgae, nempe lilium. Petens ab eo si vellet sanari ; quo respondente, etiam : Vade (inquit) ad locum cui nomen Grestanum juxta fontem... » (*)

    …Il arriva, une certaine nuit, alors qu’il dormait, qu’il vit apparaitre la vierge Marie tenant à la main une fleur blanche en forme de branche, en vérité un lis : Elle lui demanda s’il voulait guérir ; Comme il lui répondait que oui : « Va (lui dit-elle) en un lieu nommé Grestain, près d’une source où se trouve une chapelle qui m’a été jadis consacrée mais que le temps a presque détruite.
    Tu la rétabliras et y placeras un clerc qui en desservira l’autel.
    Alors, tu guériras… »

Peu après, par un autre rêve, Notre Dame lui ordonna de fonder, au même endroit, un couvent de religieux « qui prieraient Dieu nuit et jour. »
C’est ainsi qu’Herluin, guéri, fonda l’abbaye Notre Dame de Grestain en l’an 1050.

arlette

Arlette

Arlette était la fille d’un tanneur de Falaise. Lorsque le futur Duc de Normandie, Robert le Magnifique, aperçut la jeune fille lavant du linge dans la rivière, il en tomba éperdument amoureux. Ils avaient seize ans…
Ecoutons le trouvère Benoît de Sainte Maure :

    Elle s’avait la color plus fine
    Que flors de rose ne d’espine
    Ne rien séant, boche e menton
    Rien n’eut plus avenant façon
    Ne plus bel col, ne plus beaux bras.

… et le chroniqueur, Philippe Mouskes, qui vante sa beauté, mais aussi sa bonté :

    (Elle)… devint si belle
    K’il n’ot dame ne demoisiele
    En la tière, de sa biauté
    Ne de valeur ne de bonté.

Robert l’épousa selon la tradition des Vikings, à la « danesche manere », la manière danoise :

    Icele ama moult e tout chere,
    Mais ci la danwhe manere
    La volt avoir, non autrement.
    Ce dist l’estoire, qui ne ment.

Arlette et sa famille
Arlette fut donc la « frilla » de Robert, épouse légitime pour ces Normands attachés à leurs antiques traditions païennes, mais concubine selon les mœurs chrétiennes.
C’est de leur union que naquit Guillaume, le futur conquérant d’Angleterre ; héritier très légitime du duché de Normandie pour les uns, mais bâtard pour les autres.
A la mort du duc Robert, elle épousa Herluin de Conteville, un honnête et modeste seigneur, dont elle eut deux fils, Robert de Mortain et Odon, le futur Evêque de Bayeux, qui tous deux furent les plus proches compagnons de leur demi-frère.

L'abbaye fut richement dotée


L'abbaye fut richement dotée
Par Herluin …
Trente acres à Grestain même (l ’enclos actuel de l’abbaye), les bordages tenus par les pêcheurs de la Franche-table de Grestain, les bois de Normare et de Fiquefleur, le tiers des moulins de Sainte-
Mère-Eglise (Notre Dame du Val), et de Carbec, cent trente acres à Foulbec,Vauville, Martainville, Bretteville l’Orgueilleuse, Munneville sur mer, Tilly sur Seulle, Sainte Scolasse, et au Marais Vernier…

Par son fils, Robert de Mortain…
Droits maritimes depuis le gord de Quillebeuf jusqu’au Noirport, coutumes, marées, varech, pêches, la propriété de tous les esturgeons, du premier saumon, de la première lamproie pêchés dans la rivière, toute la terre et les galets que les flots recouvrent le long du rivage à
Jobles, Fiquefleur, Cremanfleur et Honfleur…

Par Mathilde de Montgommery (épouse de Robert de Mortain) et leur fils Guillaume de Mortain…
Une maison à Londres, vingt-neuf localités dans les comtés de Dorset, Sussex,Worchester, Northampton, Buckingham, Hertfordshire et Cornouailles, le manoir de Grafton (ou « Grastone »), le patronage de dix églises…

A la fin du douzième siècle, l ’abbaye possédait sept manoirs, douze églises dont St-Léonard de Honfleur, un prieuré, trois fiefs et des terres dans de nombreuses paroisses, soit un domaine de 5’830 hectares.

L’abbaye de Grestain, en laquelle, Herluin, Arlette, Robert de Mortain, Mathilde de Montgommery, ainsi que plusieurs de leurs descendants sont inhumés, fut saintement conduite par ses premiers abbés.
Parmi eux :
- Renaud de la Roque, un homme d’une grande piété.
- Foulques, dont les anciennes chartes disent qu’il était : « Vir justus et pacis amator », homme vertueux et ami de la paix.
- Herbert : « Vir venerandus. Lumen erat caeco, pes claudo, panis egeno. », homme vénérable. Il était la lumière de l’aveugle, le pied du boiteux, le pain de l’indigent.

En l ’an 1180 avec l’élection de Guillaume Huband d’Exeter, cette belle tradition se perdit.
A peine élu, il quitta Grestain et se rendit en Angleterre pour y vivre en châtelain des possessions de l ’abbaye outre-manche. Sans guide, les moines de Grestain se livrèrent à des comportements si dépravés, que l ’évêque de Lisieux s’en plaignit au pape Alexandre III :

    « Il est un monastère, lui écrivit-il, nommé Grestain, qui autrefois répandait tout alentour une odeur de sainteté, mais sous l’administration de cet abbé, le désordre y est apparu… La conduite scandaleuse des religieux… est offerte aux regards de tous…
     ... ils ne pratiquent plus la charité envers les autres… un des moines tua le cuisinier… il l’assomma du coup vigoureux d’un lourd pilon… L’abbé s’est mis en route pour aller vers vous. C’est un homme dissolu et menteur… »

Cet épisode criminel, marqué par au moins deux meurtres, dura cinq ans. Il fut clos par le remplacement de l’abbé et de tous ces moines pervertis.

La vie monastique put alors reprendre un cours normal… si l’on peut dire, car pendant les cinq siècles suivants, l’abbaye connut bien des vicissitudes.
Elle fut brûlée et pillée plusieurs fois par les Anglais pendant la guerre de Cent ans. Elle servit d’abri à la soldatesque, vécut les temps de la peste.
Néanmoins, elle survécut. En 1450 Charles VII y séjourna près d’un mois pendant le siège de Honfleur, et c’est là qu’il signa l’ordonnance prescrivant une enquête sur le procès de Jeanne d’Arc.

Plus tard, aliénant peu à peu ses possessions, elle devint une abbaye au rayonnement purement local et finit par péricliter.
En 1757, un décret royal prononça la suppression de la conventualité de l’abbaye qui, en tant que telle, cessa d’exister. Eglise et bâtiments qui, faute d’entretien, tombaient en ruine, furent démolis, à l ’exception de la salle des hôtes sur laquelle fut aménagée une modeste maison pour y loger un chapelain.
En 1790, elle fut vendue à un armateur du Havre, puis elle passa entre les mains de plusieurs familles avant d’être convertie en ferme. Jamais, pourtant, le souvenir des origines ne se perdit.

L'abbaye aujourdhui


L'abbaye aujourdhui

Dans les années 1960, les actuels propriétaires ont entrepris de mettre en valeur ce lieu si important dans l’histoire du pays. Ils ont voulu le rendre accueillant, ouvert à tous ceux qui souhaitent le visiter.
N’est-ce pas d’ailleurs la vocation de Grestain ? faire vivre le souvenir d’Arlette et d’Herluin qui devaient, sûrement, avoir bien des vertus pour que l’histoire nous dise d’eux si peu de choses.
Et si le lieu de leur repos est maintenant un joli jardin, n’est-ce pas justice ? N’y sont-ils pas, après tout, chez eux ?

Diaporama

http://nanienormandie.canalblog.com/albums/abbaye_notre_dame_de_grestain/index.html

 

 

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